HISTOIRE VRAIE
Il était une fois
Une petite maison au Mas
Pour une fois, je vais parler à la première personne pour évoquer l'histoire d'une petite maison dans un coin sympathique du village, un peu en retrait comme pour s'isoler de la vie.
C'est dans les années 1960 que nous sommes venus pour la première fois à Mialet. Nous étions avec mes parents des campeurs, des vrais à l'époque, toile canadienne, réchaud et lampe camping gaz, remorque 5ème roue derrière la traction avant 11 normale. Avec un ami de mon père contremaître à la SNCF comme lui et campeur invétéré nous nous étions convertis à ce loisir pas très cher qui nous permettait de passer des vacances "low coast" comme on dirait maintenant. Nous étions donc avec une autre famille originaire de Boulogne Billancourt amis de l'ami de mon père, en villégiature d'été durant un mois aux Plans chez Monsieur et Madame Michel (Edmont et Léa) qui nous avaient accordé le droit de séjourner dans leur châtaigneraie. Nous étions les premiers campeurs du camping des Plans avant que celui-ci existe officiellement.
Les Michel étaient agriculteurs et métayers de la propriété des Plans appartenant à l'abbé De Girard de Miellet Van Coëhorn de Saint André de Valborgne qui était aussi propriétaire du château de Saint Jean du Gard, et aussi du château d'Aubignac dont le métayer était Paul Pradeilles.
Après les rives du Chassesac au Vans (avant la mise en eau du barrage de Villefort) fréquenté l'année précédente, nous allions faire connaissance du Gardon de Mialet.
Nous passions des vacances magnifiques et calmes, la rivière était le lieu le plus important de la journée qui ponctuait les balades à pieds, Les Aigladines par la draille à partir du Lauret, l'ancienne route de St Jean à Mialet par La Fenadou, Malbosc puis Paussanel, le pont des Camisards. Le pays a tellement plu aux parents que l'idée d'acheter un morceau de terrain germa dans leur esprit. En cherchant le coin idéal, c'est à Mialet deux ans plus tard que vint l'opportunité d'un achat auprès de Monsieur Pongy qui résidait sur la place du temple au village. Il vendit à mes parents deux parcelles de terrain au lieu-dit Le Mas. C'était une ancienne vigne plantée d'oliviers et de deux cerisiers. Deux "clapas" bordaient le terrain et faisaient clôture.
C'était parti.
On aménagea la rampe d'accès pour y monter la caravane. Finis Les Plans, bonjour Le Mas. Le séjour d'été était maintenant consacré en partie aux travaux d'aménagement. Les balades changeaient de secteur, la Sauque Ronde, Roquefeuille, le Mas Soubeyran.
Puis vint l'idée de construire une maison qui servirait pour les congés d'été et quelques jours dans l'année.
Les plans de la future maison furent proposés par Monsieur Costeraste résidant aux Prés Rasclaux à Alès qui à temps perdu réalisait quelques plans de construction. Le gros œuvre fut confié à Monsieur Fages de Luziers, la plomberie à Monsieur Boulet de St Jean, l'électricité et le chauffage central restait le domaine de mon père. Pour le chauffage central, mon père toujours à la recherche de nouveauté opta pour une installation "monotube" + circulateur plus tôt que le principe deux tubes + circulateur habituel économisant du coup sur le temps de mise en œuvre et le matériel.
Dans le jardin, on avait installé la caravane pour les vacances en attendant la construction de la maison.
Mon père faisait le trajet Mialet / Paris plusieurs fois dans l'année de construction pour suivre l'avancement du chantier et installer l'électricité. Quand la maison fut terminée, adieu la caravane bonjour la maison.
Pour permettre aux voitures de monter dans le ruisseau jusqu'au mas deux terres au-dessus, mon père cédât un mètre de terrain à la commune sur la droite de la propriété en échange de la reconstruction du mur.
Militaire puis ayant un emploi à Paris, hors vacances, je descendais moins souvent à Mialet. Lorsque personnellement je quittais la région parisienne pour le midi, mon père qui s'était fait des copains à Mialet dont monsieur Deschamps (employé municipal), décidât de quitter aussi Paris pour s'installer définitivement à Mialet.
La maison de vacance devint l'habitation principale de mes parents. Pour recevoir mes frère et sœur, la maison n'ayant que deux chambres, mon père entreprit d'agrandir en construisant sur l'arrière une grande pièce et une plus petite qu'il voulait aménager en cuisine. Il arrangeât le jardin, soignant ses oliviers et vit grandir le tilleul et les trois cèdres. Il se plaisait énormément à Mialet. Passionné d'horlogerie, sous le regard de Henri Deschamps, il réglât l'horloge de l'église qui un jour avait décidé de ne plus donner l'heure aux mialétains. Cette horloge est maintenant en exposition devant le bureau du maire.
Malheureusement, la maladie l'emportât alors qu'il n'avait profité que de quelques années de retraite. Avant de partir il avait voulu voir du feu dans la cheminée du séjour dont il avait fabriqué la hotte mais pas eu le temps de terminer la mise en place.
Ma mère restera dans la maison familiale jusqu'à son départ à presque cent ans.
La maison fut vendue à Mr et Mme R.C. qui déplacèrent la cuisine dans la pièce arrière (mon père aurait été content) et construisit une nouvelle chambre sur le côté et modifiât salle d'eau et reconstruisit les WC.
Les nouveaux propriétaires continuèrent à entretenir le jardin toujours aussi accueillant puis à leur tour mirent la maison en vente.
Quelle surprise d'apprendre que c'est la commune qui s'est portée acquéreur de la maison afin que le projet entre dans le cadre d'une OAP (Action d'orientation et d'aménagement et de programmation) pour appuyer le PLU en gestation. Monsieur le maire a annoncé dans un article de notre confère ML, vouloir y installer le centre culturel regroupant la poste, un bureau de co-working, le point d'information touristique, la bibliothèque, avec salle de lecture. Cela signifie qu'un certain nombre de travaux vont être entrepris afin que le lieu soit conforme aux règles PMR : rampe d'accès, agrandissement du couloir de liaison interne, destruction et reconstruction des WC pour les mêmes raisons, sans compter les aménagements nécessaires à chaque activité, liaisons internet pour le bureau de poste différente de cellei pour le public, réalisation d'un parking, reconstruction des murs de soutènement du terrain en bordure des deux ruelles (sans oublier que l'une d'elles est un exutoire des terres situées plus haut qui se transforme en torrent par fortes pluies), réfection des canalisations de tout à l'égout, reprise complète de l'installation électrique et de chauffage, etc. etc, enfin tout refaire.
La belle petite maison prête à l'emploi, c'est à dire habitable immédiatement sans travaux, va devenir un vaste chantier. Mon père qui bichonnait son jardin serait surpris de le voir transformé en parking et sa maison en hall de gare, quoi que, ancien cheminot, il se sentirait presque encore chez lui.
Alors, vous qui un jour ou l'autre passerez à la poste ou à la bibliothèque ou viendrez faire du Co-Working, souvenez-vous que ce lieu fut une maison d'habitation construite et entretenue avec passion, alors vous ne vous laisserez pas conter des carabistouilles car maintenant vous connaissez son histoire, la vraie écrite par celui qui l'a vécue.
Votre serviteur
MR
Petite précision concernant ce récit lequel pourrait être mal interprété.
La décision d'achat de cette maison a été votée à l'unanimité par la conseil municipal le 17 octobre 2023 donc un choix certainement judicieux et ce récit n'est en aucune manière une critique ou une remise en cause de ce choix, mais juste l'expression d'un regret en regard du travail et de l'intérêt porté par mon père pour faire de cette maison son habitation et que cette affectation ne soit plus d'actualité.
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